Ma pratique picturale commence véritablement en 2011 lorsque j’accepte que je n’ai aucune inspiration et que je ne sais pas quoi faire. Alors étudiant à l’institut supérieur des arts de Toulouse, je suis membre du groupe de recherche Malerei2020Peinture qui vise à sonder l’avenir de la peinture. La solution est alors toute trouvée : je vais reproduire ce qu’il y a en face de moi – mes camarades en train de peindre.

Une quinzaine d’années plus tard le procédé est le même : je peins ce qu’il y a en face de moi – les espaces d’expositions vides se substituant aux ateliers de l’école. Les artistes ne sont plus le sujet mais sont invité·es à intervenir dans l’espace créé par mes représentations picturales. Car ma peinture est une scène à habiter, à augmenter, un espace dans l’espace qui crée de nouvelles possibilités d’accueil pour les productions des artistes avec qui je travaille.

De l’intervention picturale directe à l’accrochage d’œuvres, les propositions varient. L’utilisation de la surface diffère également : certain·es artistes utilisent l’espace nouvellement créé par la perspective quand d’autres n’en tiennent pas compte et interagissent avec les formes et les couleurs proposées. Enfin, il arrive que j’intervienne sur la peinture d’un·e autre artiste ou que ma proposition ne trouve pas preneur·euse, laissant alors ma peinture inhabitée.

Si son sujet et son rôle n’ont que peu changé, sa matérialité, elle, n’a eu de cesse d’évoluer au gré du développement de mes réflexions. Après m’être progressivement passé du châssis puis de la toile, j’ai renoncé à l’huile de lin et à l’essence de térébenthine pour me tourner vers une peinture murale éphémère faite de pigments mélangés à l’eau. Récemment, j’ai troqué les pigments pour des matériaux que je trouve dans l’espace d’exposition, renforçant encore la relation entre l’espace et ma peinture.

Peintre sans pratique quotidienne, je produis uniquement lors de mes temps de résidence et d’exposition – me plaçant ainsi à rebours de l’image fantasmée du génie créateur à l’intériorité débordante. L’abandon de l’atelier et de la création d’objets me permettent d’interroger les normes des mondes de l’art et de questionner le rapport à la vente, et ainsi notre rémunération, ou notre impact environnemental.